14 septembre 2004
blanc, noir, bleu...

De jour, de nuit, quand ça me chante, je tire quelques ficelles d'information, je vois des nombres, des noms, parfois des images. J'en tire l'occasion de faire le pitre, en oubliant parfois le dérisoire de ma situation : un clampin protégé du monde par un écran et un clavier, et qui se permet de donner son avis.

Et des fois je lis des textes comme celui-ci.

Des textes qui me replongent malgré moi dans les heures sombres de peur et de dégoût. Je revois des scènes de folie dont il faudra bien que je me débarrasse un jour, si je veux redevenir autre chose qu'un clampin protégé du monde par un écran et un clavier.

Des visages et des noms tournent. Des gens dont je ne sais plus rien après avoir partagé avec eux l'essentiel et l'ultime. Des remarques hallucinantes de drôlerie lâchées dans des situations atroces. L'absurde et l'humain poussés à l'extrême. L'odeur du danger et de son amie la peur, l'odeur de la mort et de la violence, tout ça me saute parfois brutalement à la figure. La litanie des efforts dérisoires et sublimes à la fois, de ceux qui font la différence, ou pas.

Mais là, il va falloir que je me prépare à aller travailler. Que je redevienne normal, souriant, enjoué, que je m'enthousiasme pour...

Vendredi j'ai eu un entretien avec mon chef. Pour un poste "à responsabilités". Il m'a demandé de lui décrire un héros. Mon héros. Et j'ai eu tant de mal à ne pas laisser la porte s'ouvrir en grand, ne pas laisser se déverser le flot terrifiant que je retiens de toutes mes forces depuis mon retour dans la "vraie vie"...

Un ami me disait l'autre soir : "Man, you're a white nigger. You've got the blues inside."

On était sous des pommiers, dans un jardin, on venait de vider une bouteille de rhum tous les deux, j'étais là, et j'étais ailleurs. Je suis toujours aussi un peu ailleurs.

Écrit par O. le 14 septembre 2004 à 09:17
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