13 juillet 2004
Le retour du Doc...

Pas de panique. On ne parle pas d'Haïti et de ses illuminés sanguinaires à la Papa Doc. On parle fauteuils confortables, multiplex, petit plateau en plastique attaché au siège pour le popcorn, message oh-tellement-subtil pour rappeler aux gens de bien vouloir éteindre leur ombilical - couleur - polyphonique. On parle salles obscures et idées claires : on parle cinéma documentaire.

En ce moment, trois documentaires font parler d'eux, à des degrés divers, mais pas si éloignés. Le premier, pachydermique, c'est bien évidemment Farenheit 911. Je ne l'ai toujours pas vu. Notez qu'il fait un carton partout où on le diffuse, et je m'attends en Août à un carton monumental à Copenhague. Le truc qui me chiffonne, mais ça ne nous dit pas grand-chose sur le film lui-même ; ça nous dit quelque chose sur ce que le cinéma est devenu, c'est que je ne peux trouver nulle part les chiffres de fréquentation. Tous les chiffres qu'on trouve, c'est le montant des tickets achetés.

Le film vient d'engranger 1,3 million de livres (1,96 million d'euros) depuis sa sortie officielle le vendredi 9 juillet, soit le meilleur résultat d'exploitation en un week-end pour un film documentaire, a précisé PA. "Fahrenheit 9/11", sorti sur 132 écrans au Royaume-Uni, a largement battu le record précédent de recettes en un week-end pour un documentaire, détenu jusqu'alors par le précédent film de Moore, Bowling for Columbine, avec 158.000 livres (237.000 euros).
Tiré d'une dépêche AFP visible ici.

Combien de spectateurs, mystère.

Mystère n'est naturellement pas le mot qui convient. Rien de mystérieux : on ne cherche pas à nous cacher le nombre de spectateurs. Simplement on s'en fout. Ce qui compte, c'est combien de sous le film rapporte. Dommage... quand un film se donne le but avoué de changer les mentalités des gens, il serait bien qu'il puisse dire combien il en a atteint.

Deuxième documentaire qui marche mieux qu'on ne l'aurait pensé : Supersize me. Celui-ci aussi, je suis assez curieux de le voir.

Mais en fait celui que j'attends vraiment, le plus important, vient de sortir. Et quand je dis ça... je ne sais même pas s'il sera distribué en salle. Mais j'espère. Sinon, il va falloir faire des acrobaties pour le voir. Il s'appelle Outfoxed et démonte les mécanismes utilisés par Rupert Murdoch pour, via sa chaîne "d'informations" Fox News, prémâcher l'argumentaire de la droite conservatrice américaine et organiser le gavage des cerveaux. On n'est pas si loin de Supersize me qu'on le pense.

Incidemment, j'ai reçu un mail de l'ami Loïc l'autre jour. Ce mail tend à montrer qu'on a, en France, notre Murdoch local, mais avec un but à sa taille : pas question d'idéologie ici. On en reste au simple et bon vieux pognon :

"Il y a beaucoup de façons de parler de la télévision. Mais dans une perspective "business", soyons réaliste : à la base le métier de TF1 c'est d'aider Coca-Cola, par exemple, à vendre son produit. Pour qu'un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible, c'est-à-dire de le divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c'est du temps de cerveau humain disponible. Rien n'est plus difficile que d'obtenir cette disponibilité".

Cette citation est consultable, entre autres, ici. Elle est suivie de cette phrase mémorable : "La télévision, c'est une activité sans mémoire."

Peut-être qu'un certain cinéma est en train de se charger de nous la rendre...

Écrit par O. le 13 juillet 2004 à 07:13
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Un peu plus sur Supersize me en Français : ici.

Mis à jour par O. le 13 juillet 2004 à 19:33