03 novembre 2003
Petit lexique d'un conflit : G comme Guerre.

Golan me paraissait être un bon candidat pour G. De là je suis passé à Golani, du nom de la tristement célèbre brigade des FDI, avec laquelle j'ai entretenu pendant quelques mois des rapports... disons tumultueux, puis j'ai glissé vers Galil, histoire de m'épancher sur l'industrie de l'armement en Israël (Galil est le nom d'un fusil d'assaut)... et puis je me suis fait rappeler à l'évidence par une personne de bon sens.

Au risque de froisser quelques idées communes, aujourd'hui, je fais ma petite Guerre.

Inspirez...


Il y a une différence de taille entre le conflit Israélo-Palestinien et les conflits coloniaux "classiques" (de type guerre d'Algérie), c'est que les Israéliens n'ont aucun problème à dire qu'ils sont en guerre. Là où la France entière (ou presque) a anonné pendant des années "évènements" à l'unisson de la presse et du gouvernement, les Israéliens sont bel et bien en guerre. Notez, rien de surprenant : le pays a une mentalité d'assiégé à toute épreuve, et on les croirait en guerre contre le monde entier.

Guerre, donc. Et depuis peu, même, sautant avec brio en marche dans le train américain, "guerre contre le terrorisme". Notez qu'avant ça, on pouvait régulièrement lire que les colonies étaient des lignes de défense avancées, que tout cela était purement défensif, etc. Le reste du monde faisait semblant de ne pas regarder de trop près.

Mais depuis la "war on terror" venue de l'ouest, tous les garde-fous ont sauté. Personne n'est choqué de voir qu'à chaque fois qu'une trève se prolonge un peu, il y a un ou plusieurs assasinats de "terroristes", immanquablement suivis de représailles (généralement elles-mêmes de type terroristes, mais il y a visiblement un "bon" et un "mauvais" terrorisme), et du concert de lamentations et de condamnations de circonstances, suivi d'un "on vous l'avait bien dit" israélien.

Ce qui m'amène formuler clairement ma position sur une des lignes de fractures qui me séparent de pas mal de "pro-palestiniens". Pour le coup, c'est moi qui inspire :

Les attentats-suicide contre les populations civiles israéliennes sont bel et bien du terrorisme. C'est moralement et politiquement indéfendable.

Même si les méthodes employées par les Israéliens ne valent pas mieux, même si ils pratiquent avec une plus grande ampleur un terrorisme systématique et bien plus impitoyable que celui de Hamas et consorts.

Moralement, ça me révulse. On ne bute pas des gens au hasard, juste parce qu'ils sont là. Je proteste quand les Américains le font, en bombardant plus ou moins à l'aveugle avec leurs missiles ou les B52, je proteste quand les Israéliens lâchent des missiles ou tirent dans la foule, et de la même façon je proteste quand un palestinien se fait sauter dans un bus, un marché ou un restaurant.

Je ne conteste pas le droit aux Palestiniens de pratiquer une résistance armée contre l'occupant. Même si au fond de moi le vieux pacifiste préfèrerait d'autres modes d'action, la mort de soldats israéliens dans les territoires ne me fait ni chaud ni froid. Enfin si, mais bon. C'est toujours des vies gâchées, mais il n'y a rien à redire quand une résistance s'en prend aux forces occupantes.

L'argument qui dit que tous les Israéliens sont des militaires, et qu'il n'y a donc pas de civils est une idiotie. Pareil pour les colons. Le type qui s'est infiltré dans une colonie, est rentré dans une maison, a abattu les parents, puis a tiré de sous le lit la gamine de cinq ans pour la flinguer n'a pour moi aucun crédit moral. Amnesty International a appelé ça un crime contre l'humanité, et je partage leur opinion.

Ce qui m'amène à la position qui me fâche avec tous les pro-israéliens que je connais : même si je n'approuve pas les gens qui font ça, je comprends pourquoi ils le font.

Je comprends l'incessante pression, la cascade infernale de malheurs qui s'abat sur des gens qui n'ont rien demandé à personne. Je comprends que quand une famille a perdu treize morts aux mains des Israéliens, la treizième soit une kamikaze.

Mais je n'approuve pas.


Incidemment, j'ai "raté" un attentat d'une demi-heure, rue Ben Yehuda à Jérusalem.(22 janvier 2002) J'ai entendu les coups de feu du type qui canardait la foule alors que j'allais moi-même me rendre à cet endroit. Imaginez le déchaînement si un citoyen français notoirement impliqué dans la solidarité avec les Palestiniens avait été tué par un Palestinien dans une opération suicide.

Car l'autre terrain de cette guerre est là : l'opinion. Israël ne survit que parce qu'ils réussissent à garder en toutes circonstances une image de victimes.

La tendance s'inverse peu à peu, de plus en plus de gens se rendent compte que les Israéliens ne sont pas que des victimes, mais aussi les impitoyables geôliers et parfois bourreaux de tout un peuple.

Chaque attentat contre des civils israéliens est une épouvantable victoire médiatique israélienne. Et il est suivi de représailles, dans lesquelles ce sont cette fois des Palestiniens qui dégustent. Représailles pratiquement applaudies par une planète sagement rangée sous la bannière de guerre contre le terrorisme...

... alors que le pire des terrorismes est ailleurs.

L'Intifada se gagnera ou se perdra sur les écrans de télés, d'ordinateurs, ou sur les pages des journaux. Telle est la guerre que les Palestiniens auraient intérêt à mener. En quatorze mois, j'ai été amené à serrer les poings bien des fois, j'ai été déchiré de haine, et pourtant je sais que ces pauvres 14 mois ont été un hâvre de paix protégée quand je les compare à toute une vie dans ces conditions, et sans le passeport français comme bouclier. Je sais un peu la colère, le désespoir. Je sais les malins dans l'ombre qui manipulent, endoctrinent, et envoient d'autres à la mort. Et ceux-là, je leur en veux autant que j'en veux à mes petits copains de la brigade Golani à Jénine, ou aux conducteurs de D9 à Rafah ou ailleurs.

Respirez, ma petite guerre est finie.

Écrit par O. le 03 novembre 2003 à 15:58
Réactions

Carramba!!! Encore raté, trop à gauche.
J'avais éliminé guerre; trop général. J'avais pensé Golan, trop particulier.Ou Général, trop militaire....En optant pour Génération, j'envisageais générations entières,n'ayant connu que la Guerre, ou l'état de guerre.
Cette fois je me rapproche!
J'essaie donc encore.

H comme Hass, Amira??

Mis à jour par Marc le 03 novembre 2003 à 17:49

J'y ai pensé, mais... non ! :)

Mis à jour par O. le 03 novembre 2003 à 20:43

Ne désespère pas, Marc!

Quand O. arrivera du côté des WXYZ, il ne sera pas fâché qu'on lui fasse des suggestions...

Mis à jour par Giorgio le 03 novembre 2003 à 22:31

Grand merci Giorgio!
Je ne désespère pas j'aime jouer.
Et puis j'ai déjà mon Z.
Z comme zut je n'ai même pas 1 point!

Mis à jour par Marc le 04 novembre 2003 à 02:19

G comme guerre, pas très avenant au départ, mais j'ai bien aimé le texte ;-)
Je suis un peu étonné qu'aucun boq ou autre n'est encore sursauté à la lecture de la phrase:"Israël ne survit que parce qu'ils réussissent à garder en toutes circonstances une image de victimes."
La survie d'Israël, rien que ça ?!

Je participe aussi au petit jeu. H pour "Humanitaire" ?

Mis à jour par pe le 04 novembre 2003 à 09:46

C'est vrai que la phrase n'est pas adroite. Ce que je veux dire, c'est qu'Israël est relativement immunisé de la pression internationale que parce que le public américain les perçoit comme uniquement victimes de la situation. Si Mrs Smith, ménagère américaine de moins de 50 ans, commence à percevoir Israël plus comme une puissance occupante et malveillante que comme victime, les choses vont *rapidement* évoluer.

Mis à jour par O. le 04 novembre 2003 à 10:12

je me demande si vous vous etes deja trouve devant quelqu un qi veut vous tuer et met son gosse comme bouclier et israel ne se considere pas comme 1 victime.

Mis à jour par robert le 20 décembre 2003 à 22:24

Ben oui mon gars je me suis déjà trouvé devant quelqu'un qui voulait me tuer : des soldats israéliens.
Israël ne se considère pas comme une victime ? Où avez-vous passé les quarante dernières années ?

Mis à jour par O. le 21 décembre 2003 à 00:29