27 novembre 2003
Langue, langages, et jargons

Je vis dans un univers totalement multilingue. A la maison, on oscille entre Français, Anglais, et Danois. Au bureau, même chose, plus l'Allemand. Autour de moi, livres et télévision oscillent entre Danois et Anglais, avec un peu de Suédois.

Je suis francophone de naissance et de conviction, mais je pourrais tenir C'est Chez Nous avec la même facilité en Anglais. D'ailleurs, souvent, les liens que je fais sont vers des documents en Anglais, parce que leur équivalent français n'existe pas, ou que je ne l'ai pas trouvé.

J'aime l'idée de dire "courriel" au lieu de "e-mail". Je comprends le besoin de maintenir la langue française, de la mettre à jour. Mais parfois je ne comprends pas le procédé, ou même la motivation.

Sur le web, le site de référence, quand on parle francophonie, c'est celui-ci. Mais ce qui m'amène à parler francophonie, c'est cet article là, sur le défunt et regretté navire.net.

On y cause francophonie dans le monde des "blogs" francophones. Voire francophonistes. On y établit le bon usage du vocabulaire de ce nouveau secteur du langage qu'est le "blog". Ce que vous êtes en train de lire s'appelle, selon les chapelles, un "blog", un "blogue", un "carnet", un "joueb", et j'en oublie.

Pourquoi est-ce que ça m'interpelle ? Parce que je ne comprends pas tout. Déjà, mais là c'est plus social que linguistique, le concept de "blogosphère" m'est totalement étranger. Mais surtout, parfois, j'ai l'impression que la francophonie se tire dans le pied.

Voilà un moment que je ne dis plus "ordinateur" mais "computeur". Le mot computer anglais est bâti sur le mot "comput". N'importe quel dictionnaire vous confirmera que le mot comput était utilisé dans la langue française au temps de Blaise Pascal, et probablement même bien avant. Ce même mot nous revient sous la forme "computer", mais horreur, c'est de l'Anglais !

Au lieu de se réjouir de la vivacité du Français, on se plaint de l'invasion. Les anglophones nous offrent sur un plateau "computeur", et on se précipite à forger de toute pièces un "ordinateur". Le pire, c'est qu' ordinateur n'ordine même pas : il compute.

Si on est capable d'admettre qu'on peut utiliser "chiffre" qui est un mot arabe, mais introduit depuis plusieurs siècles, doit-on penser qu'il faudra attendre plusieurs siècles pour que l'origine "anglaise" de computeur soit oubliée ?

Moi j'ai choisi de me souvenir maintenant que c'est un mot français.

La langue, de toute façon, ne nous en déplaise, fera ce qu'elle voudra. Ce que vous et moi en ferons. Pardon : en faisons.

Écrit par O. le 27 novembre 2003 à 11:21
Réactions

Vi, 50% des mots anglais peuvent être décortiqués et on en trouvera l'origine latine. Le reste est en effet angle ou saxon ou franc.

Dernièrement, une copine allemande m'a sorti : "sich involvieren", néologisme total sur le modèle de de "to involve oneself", qui sonne très bas-latin, il me semble. J'ai adoré, je pense que je vais "m'involver" très vite, passque j'aime pas "m'impliquer" :)

Le délire francophone à tout crin ressemble à un facheux communaurisme, un peu intégriste.

Mis à jour par wam le 27 novembre 2003 à 12:57

Moi j'aime bien ordinateur à cause de son côté "religieux" qui me semble aller comme un gant au culte parfois fanatique dont ces machines sont l'objet dans notre monde dit moderne. La connotation religieuse était voulue par le monsieur qui a proposé le mot au directeur d'IBM France il y a longtemps : celui qui ordonne le monde par une cérémonie religieuse en quelque sorte. Le type s'appellait Jacques Perret. C'était un excellent écrivain, drôle et plutôt "humaniste" (le "Caporal épinglé", c'est lui), un puits de science et de vocabulaire et un authentique resistant aux nazis. C'était aussi un homme d'extrème droite, intégriste religieux et partisan de l'Algérie française. La lumière et la boue dans le même bonhomme, comme dans les machines qu'il a nommées.

Mis à jour par Manu le 27 novembre 2003 à 13:11