01 juillet 2004
Saddam et Hardy

Fascinante scène sur BBC World, la seule chaîne d'information digne de ce nom que je puisse capter : Saddam parlant, discourant, pérorant, à perte de temps... mais sans le son.

La démocratie est en marche. Les Soviets ne se cassaient pas les pieds, et savaient l'importance du procès public : ils cassaient le suspect jusqu'à ce qu'ils soient certains qu'il dirait publiquement ce qu'on attendait de lui. Lire, ou relire, Le zéro et l'infini de Koestler.

Mais nous, dans le monde libre, on peut pas faire ça. On pourrait, mais on a peur que ça se voie, parce que quand ça se voit qu'on torture un peu les gens ça fait perdre des points dans les sondages. Alors nous, dans le monde libre, on innove : on fait un procès public, parce qu'il est important que les Irakiens, et le monde, voient Saddam passer en jugement. Mais sans le son.

Ben voilà. Ils *voient*.

On se passera du son. C'est pas que ça coûtait beaucoup plus cher, hein, c'est juste qu'on ne sait pas ce qu'il va raconter, le Saddam. On a peur qu'au lieu de se souvenir des crimes qu'il a fait tout seul, il choisisse de se souvenir de ce qu'on l'a aidé à faire. Quand on l'interrogera sur les gaz utilisés sur les Kurdes, imaginez qu'il se mette à dire qui les lui a vendus ? Ben oui. Il faisait quoi Rumsfeld à Bagdad à serrer la main du Saddam à l'époque ?

Sinon, pour la quoi... cinquième fois en quelques semaines, les Américains ont aplati une maison "utilisée par Machin" (remplacer Machin par le nom du mec recherché du moment) et tué quelques pauvres types qui étaient au mauvais endroit au mauvais moment.

Que voulez-vous, ma bonne dame, on ne fait pas d'omelette sans casser des oeufs.

Ne nous méprenons pas : c'est *très bien* que Saddam soit jugé. Mais la censure, c'est pas une pratique acceptable quand on vient au nom du "monde libre". D'autant que ça ne va pas traîner avant qu'un propagandiste un peu moins gland que la moyenne interprète ça comme un signe de faiblesse.


Écrit par O. le 01 juillet 2004 à 20:49