01 décembre 2003
Les années quatre-vingt commencent...

J'ai dans la tête cette chanson de Jonasz, pendant que je traduis pour vous, lecteurs chéris, cet article que j'ai lu entre deux pages, et sur lequel j'ai décidé de revenir. Constat implacable, délire de vieux hippie, considérez-le comme vous voudrez. Voici le regard d'un Américain sur sa génération.

Je regrette que nous ayons participé a redéfinir le "cool", d'un état intérieur de grâce et de rebellion à un affichage de consommation et de conformisme.

A lire en salé-sucré, loin des Zara qui croassent. A transposer en mode mineur diminué. C'est plein de références très Américaines, difficiles à traduire, mais je ne doute pas que vous saurez franciser.

Le texte est en Suite.


Je demande pardon aux jeunes Américains
Par Sam Smith

A l'occasion du proche 66ème anniversaire de mon arrivée sur cette planète, je voudrais vous présenter mes excuses au nom de ma génération. Même les confédérés onteu l'élégance de faire sécession de l'union; ma génération est restée à l'intérieur comme un virus mortel, la subvertissant, la couvrant de honte, la déformant, la volant, et finalement l'étranglant. On s'en souviendra probablement comme de la pire des générations, celle qui a abattu la première république américaine, sans rivale dans les dommages portés à la Constitution, l'environnement, et à un combat bicentenaire pour créer une société démocratique et humaine dans sa politique, son économie, et son contexte social.

Pour sûr, quand nous étions jeunes nous étions, comme nous disions alors, autre chose. Nous avons lancé les mouvements des droits civiques, des femmes, des gays et de l'environnement, sans oublier que nous avons créé de la musique mémorable avant de tomber dans le disco. Rapidement, le reste aussi a commencé à dévaler la pente. Nous sommes devenus non seulement la seule génération à inventer la phrase : "ne jamais faire confiance à quelqu'un de plus de trente ans", mais à la prouver.

Mon avocat m'assure que ma responsabilité personnelle à tout ceci se limite à quelques faux pas parmi lesquels un manque d'économie d'énergie, une inefficacité chronique, avoir un minivan, et écouter du Don Imus de temps en temps. Mais il est d'accord que des excuses publiques pourraient aider en cas de tribunal de crimes de guerre ou pour déterminer le montant des réparations dues par mes héritiers aux générations futures.

De toute façon, il est peu probable qu'aucun autre de mes congénères s'excuse, puisque c'est contraire à leurs principes en l'absence d'action en justice imminente, ou de media. Et comme le souligne mon avocat, il y a un tas de chose à se faire pardonner, dont la publication par le New York Times de Tom Friedman, qui ne constituent pas techniquement un crime.

En passant, pour le remords public, je définis ma génération comme toute personne ayant atteint les 40 ans après le Watergate et qui avait au moins 40 ans le 11 septembre 2001. J'ai choisi ces dates parce que la démission de Nixon a été la dernière bonne chose à arriver à l'Amérique, et parce que le 11 septembre a mis fin à presque tout espoir de voir bientôt se passer quelque chose de bon.

Et donc, au nom de tous mes congénères membres de la plus lamentable génération américaine, je fais cette humble confession, demandant pardon à ceux qui vont suivre :

Je présente mes excuses pour Bhopal et Three Mile Island, et d'avance pour tous les désatres qui vont se produire pour cause de rapacité économique et sans l'aide du moindre terroriste.

Je suis sincèrement désolé pour Martha Stewart, le Washington Post, Howard Stern, la Brookings Institution, et Bill O'Reilly.

Je m'excuse pour toutes les infirmités durables, telles que la perte de la république, qui sont passées inapperçues pendant que les élites du pays étaient sous sédatif devant "Morning edition", C-SPAN, Jim Lehrer et Ted Koppel.

Je suis profondément gêné de la façon dont laquelle nous avons détruit le système de notre pays.

Je présente mes regrets de ce que nous avons rendu le monde musulman furieux contre nous et que nous n'avons rien trouvé de mieux à faire que le rendre encore plus furieux.

Je suis désolé pour tous les ouragans, tornades et vagues de chaleur qui sont arrivés pendant que nous continuions à débattre pour savoir s'il existait quelque chose du nom de réchauffement planétaire.

Je m'excuse pour le dérangement, comme la prison, ayant découlé de la criminalisation de l'usage de la marijuana alors que nous avons préservé la légalité de drogues beaucoup plus dures comme la vodka et les Marlboro.

Je regrette que la guerre contre la drogue ait constitué les fondations pour la fin du gouvernement constitutionnel et ait été plus mortelle pour les jeunes noirs urbains que ne l'a été la guerre du Viet-Nâm pour leurs pères.

Je suis désolé que tant de diplomés de nos plus avancées universités semblent avoir principalement appris une arrogance qui rend la théorie invulnérable aux faits.

Je suis désolé pour ces scientifiques qui croyaient qu'inventer de nouvelles manières de détruire l'humanité était un bon usage de leur temps.

Je m'excuse pour l'encombrement accru sur les routes, aux évènements, ou dans les services publics, mais la surpopulation était un sujet dont nous ne voulions tout simplement pas entendre parler.

Je regrette que nous ayons participé a redéfinir le "cool", d'un état intérieur de grâce et de rebellion à un affichage de consommation et de conformisme.

Je voudrais dire ma tristesse à l'accrue probabilité que vous avez d'attraper un cancer de la peau à cause des changements que nous avons effectués à l'atmosphère.

Je suis vraiment désolé que nous vous ayons infligé des gens comme George Bush et Bill Clinton.

Je m'excuse pour le Conseil des Relations Extérieures et les dix pourcent de ses membres qui prétendent être des journalistes objectifs. Et je m'excuse pour tout autre "journaliste objectif" qui roule pour la CIA.

Je suis rempli de remords pour le remplacement des scénario de films par des explosions, et avoir subtitué le sexuellement désirable à toute autre forme de talent.

Je présente mes excuses pour Harvard Business School et Yale Law School et toutes leurs émanations déplorables, y compris la transformation du gangster en sex symbol.

Je m'excuse pour les révolutions de management, les définitions de mission, la synergie, être au top, les entrepreneurs proactifs et de classe mondiale, le planning stratégique et les interviews de départ.

Je suis vraiment désolé que nous n'ayons pas su apporter de meilleure contribution à la philosophie que la justification de l'appât du gain en tant qu'économie de libre échange, la sanctification de l'impérialisme en guise de construction de la nation, et pour la notion que vous pouvez régler tous vos problèmes en 12 leçons.

Je demande pardon pour les dégâts que nous avons occasioné à la langue anglaise, avec l'usage de noms en guise de verbes, le remplacement des faits par des abstractions, l'inutile compressiondemots, et pour l'usage de MaJusCules quand ça nous chante..

Je suis désolé que nous ayons passé plus de lois durant les trois dernières décennies que pendant les deux premier siècles de la Nation Américaine.

Je regrette que vous soyez maintenant vus comme des terroristes potentiels, des accros, et des prédateurs sexuels, plus souvent que comme de précieux citoyens.

Je suis vraiment désolé pour ce que nous avons fait à l'enfance, en la sur-programmant, remplaçant Kermit par Barney, en apprenant aux enfants des peurs excessives et une absurde compétitivité, en les réduisant à la dépendance aux médicaments à coups de diagnostics, et en les punissant de dessiner des dessins "déplacés" dans la marge de leurs cahiers.

Et maintenant qu'on a tout mis sur le tapis, il faut songer à avancer et oublier tout ça. Après tout, même si c'est nous qui avons créé ce merdier, c'est à vous de le nettoyer. Bien sûr, si vous avez besoin d'un conseil, vous n'avez qu'à demander.

Article original ici

Écrit par O. le 01 décembre 2003 à 20:36
Réactions

Rah la la c'est implacable. Merci pour la traduction.

Mis à jour par aqb le 01 décembre 2003 à 20:48

A noter que Barney* n'est, heureusement, jamais arrivé en France (à ma connaissance). Mais surtout, que ce n'est toujours pas facile d'être vert**.

* un petit lien vaut parfois mieux qu'un commentaire affligé
** lyrics+midi & mp3 (2.1 Mo)

Mis à jour par gemp le 02 décembre 2003 à 03:11

Houla. Je ne connaissais pas Barney. Houuuuuula.

Mis à jour par O. le 02 décembre 2003 à 08:39

Effectivement, merci Gemp pour le lien. Il est beau le monde de SimpletTM... Rendez-nous Kermit!

Et encore Bush doit être issu du moule 'Kermit', on n'ose pas imaginer ses successeurs...

Mis à jour par aqb le 02 décembre 2003 à 10:38

Faut pas pousser, hein, Simplet™ n'y est pour rien sur ce coup là.

Mis à jour par O. le 02 décembre 2003 à 10:43